Luca Guadagnino Bizarre tente de traduire les couches complexes de la nouvelle de William S. Burroughs de 1985 en un drame romantique d’époque visuellement saisissant. Le film nous plonge dans le Mexique des années 1950, une époque et un lieu pleins de couleurs et de chaos, mais assombris par les troubles personnels de son protagoniste, William Lee. Interprété par Daniel Craig, Lee est un personnage imparfait fuyant son passé, essayant de trouver du réconfort ou peut-être simplement une distraction dans un pays étranger. Ce qui se déroule est une histoire qui examine les thèmes du désir, de l’obsession et de la quête d’identité.

Daniel Craig est magnifique :

Le portrait de William Lee par Daniel Craig est facilement la pièce maîtresse du film. Sa performance est nuancée, capturant les luttes internes d’un homme rongé par ses propres désirs et insécurités. Craig’s Lee n’est pas un personnage conçu pour susciter la sympathie ; il est irritable, souvent antipathique et perdu. Pourtant, il y a une authenticité dans son portrait qui attire le spectateur, nous faisant le soutenir malgré ses défauts. Le film choisit judicieusement de ne pas adoucir les limites de Lee, le présentant tel qu’il est – un témoignage à la fois du matériel source et de l’engagement de Craig envers le rôle.

L’objet de l’obsession de Lee, Eugene Allerton, prend vie par Drew Starkey. Allerton, un militaire libéré de la marine américaine, dégage un charisme juvénile et une vulnérabilité sous-jacente qui rendent l’engouement de Lee crédible. La performance de Starkey est subtile, permettant au public de comprendre pourquoi Allerton serait à la fois captivant et frustrant pour quelqu’un comme Lee. Leur alchimie est électrique, mais elle souligne également la tension centrale du film : l’incapacité de véritablement se connecter avec quelqu’un lorsque sa propre identité est en mouvement.

Casting de soutien :

Les seconds rôles ajoutent encore plus de profondeur au film. Lesley Manville dans le rôle du Dr Cotter offre une présence solide au milieu des émotions tourbillonnantes. Son personnage offre à Lee un semblant de stabilité et de raison, même si ses apparitions sont trop brèves pour explorer pleinement cette dynamique. Jason Schwartzman dans le rôle de Joe Guidry ajoute une touche de légèreté, bien qu’avec un courant sous-jacent de ses propres motivations cachées. Pendant ce temps, Winston Moor d’Henry Zaga introduit une couche supplémentaire d’intrigue et de complexité dans le récit qui se déroule.

Réalisation et rédaction :

La direction de Guadagnino est à la fois une force et une faiblesse dans Bizarre. D’une part, sa capacité à créer un décor atmosphérique est pleinement visible, avec la ville de Mexico représentée avec des détails éclatants. Les visuels du film sont époustouflants, des clubs animés et remplis de musique aux moments plus calmes et réfléchis. Cependant, le rythme faiblit parfois, certaines scènes s’attardant trop longtemps sans faire avancer l’histoire. Cela peut rendre le film lent, nuisant à l’impact émotionnel des moments clés.

Le scénario de Justin Kuritzkes reste largement fidèle au roman de Burroughs, qui est à la fois une bénédiction et une malédiction. Le film réussit à capturer l’angoisse existentielle et l’aliénation qui imprègnent l’œuvre de Burroughs, mais cette adhésion signifie également qu’il hérite du style narratif fragmenté de la nouvelle. Pour les spectateurs peu familiers avec le matériel source, cela peut prêter à confusion, car le film oscille entre les monologues internes de Lee et le monde extérieur dans lequel il habite. La structure narrative peut aliéner certains spectateurs, mais pour ceux qui sont prêts à l’adopter, Bizarre offre une expérience qui fait réfléchir.

Thèmes et éléments techniques :

L’exploration par le film de ses thèmes – l’identité, le désir et la recherche de connexion – résonne, particulièrement dans le contexte des années 1950. Les contraintes culturelles et sociales de l’époque sont omniprésentes, ajoutant une autre couche de complexité aux interactions et aux désirs de Lee. Le film ne recule pas devant les aspects les plus sombres de ces thèmes, présentant un regard brut et sans filtre sur les émotions humaines.

Au niveau de ses éléments techniques, Bizarre excelle. La cinématographie est exquise, capturant les contrastes de Mexico avec beaucoup de détails. La musique du film complète les visuels, renforçant le ton émotionnel sans le dominer. La conception de la production recrée fidèlement les années 1950, transportant le public dans une époque révolue avec une attention méticuleuse aux détails.

Dans l’ensemble:

Finalement, Bizarre est un film qui divisera probablement le public. Ceux qui recherchent un drame romantique simple peuvent trouver son approche introspective difficile, tandis que les téléspectateurs ouverts à une exploration plus abstraite de thèmes complexes apprécieront sa profondeur. Les performances, en particulier celles de Craig et Starkey, élèvent le matériau, même lorsque le récit trébuche.

Bizarre est une adaptation ambitieuse qui réussit à capturer l’essence de la nouvelle de Burroughs, même si elle lutte parfois avec le rythme et la cohérence. C’est un film qui exige de la patience et de l’introspection de la part de son public, récompensant ceux qui sont prêts à s’engager dans ses subtilités. Guadagnino a réalisé un film visuellement saisissant et à la résonance émotionnelle qui, malgré ses imperfections, laisse une impression durable.

  • Agissant – 8/10
  • Cinématographie/Effets visuels – 7,5/10
  • Intrigue/Scénario – 7,5/10
  • Cadre/Thème – 7/10
  • Observabilité – 7/10
  • Re-regardabilité – 5/10

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